Autorité Palestinienne : une crise peut en cacher une autre

Depuis plusieurs jours, les manifestations se succèdent dans les villes palestiniennes de Cisjordanie. On y dénonce la hausse des prix, notamment ceux de l'essence et des denrées alimentaires. Et on y fustige le Premier Ministre Salam Fayyad, considéré comme responsable de la dégradation du niveau de vie des ménages.

La récente augmentation des prix est une conséquence de l'imbrication des économies israélienne et palestinienne. Dans la foulée du Processus de Paix d'Oslo (1993), le Protocole de Paris définit un quasi "marché unique" entre les deux voisins. Conséquence : l'Autorité Palestinienne n'a pas le droit d'appliquer des taxes éloignées de celles d'Israël. Une harmonisation fiscale qui s'exerce au détriment des Palestiniens dont le salaire moyen est inférieur à celui des Israéliens. En clair : quand l'essence augmente en Israël elle augmente en Cisjordanie... même si le pouvoir d'achat est très éloigné d'un côté et de l'autre.

Mais une crise peut en cacher une autre. Car la véritable bombe à retardement dans ce dossier c'est l'aggravation de la crise budgétaire palestinienne. Le groupe de pilotage de pays donateurs (Ad Hoc Comittee Liaison) qui se réunira dans quelques jours à New York en marge de l'Assemblée Générale de l'ONU, pourrait bien tirer la sonnette d'alarme. Pour 2012, le gouvernement palestinien de Salam Fayyad tablait sur un déficit budgétaire d'environ 950 millions de dollars... mais on s'achemine plutôt vers un passif de 1,3 milliard de dollars, selon nos informations.

Problème supplémentaire : en face de ce déficit qui se creuse, l'aide des donateurs est en chute libre. Comme souvent ces dernières années, les pays arabes se font prier pour verser leurs contributions. Mais c'est surtout la baisse de l'effort américain qui plombe les comptes palestiniens.

En 2008, l'administration américaine a débloqué 300 millions de dollars d'aide aux Palestiniens. En 2011, seulement cinquante millions de dollars. Et selon des sources proches du dossier, Washington n'a encore rien versé en 2012, laissant planer le doute sur un hypothétique chèque de 200 millions de dollars.

Cette spectaculaire diminution de l'aide américaine est liée aux la reconnaissance d'un état souverain à l'ONU. L'annonce récente d'une démarche similaire en 2012 (cette fois devant l'Assemblée Générale et non le Conseil de Sécurité de l'ONU) ne devrait pas inciter Washington à cesser de jouer de la carotte et du bâton pour freiner l'offensive diplomatique palestinienne.

Revenons aux chiffres. Sur les huit premiers mois de 2012 les Palestiniens auraient reçu environ 620 millions de dollars d'aide budgétaire. Même si un certain nombre de chèques arrivent d'ici à la fin de l'année, on voit mal comment équilibrer le budget et ses 1,3 milliard de dollars de déficit, évoqués plus haut.

L'une des causes de l'assèchement de l'aide internationale est l'absence de cadre pour celle-ci. Fin 2007, la Conférence de Paris pour les donateurs de l'État Palestinien avait posé des jalons pour les trois années suivantes. Mais depuis 2011, aucune autre réunion internationale n'a pris le relai.

Plus globalement, on assiste à la fin - certains diront à l'échec - d'un cycle entamé en 2008 avec le "Plan Fayyad" qui prévoyait de construire en trois ans les institutions et l'économie du futur état palestinien. Une construction "bottom-up", en français "du bas vers le haut", largement financée par l'aide internationale. Ce projet a culminé en 2011 avec des certificats louangeurs délivrés par le FMI et la Banque Mondiale. Les trois institutions affirmant haut et fort que les Palestiniens étaient prêts à assumer la gouvernance d'un état souverain.

Si dans les mois qui viennent, l'Autorité Palestinienne se retrouve face à un gouffre budgétaire béant, elle pourrait perdre rapidement le statut de "bon élève" qui fut le sien ces dernières années. Et s'en trouver encore un peu plus fragilisée sur fond de persistance de la division Cisjordanie/Gaza (depuis la prise de contrôle de la Bande de Gaza par le Hamas en 2007).

Dans quelque mois nous serons en 2013 et personne n'oubliera de souligner alors le vingtième anniversaire du Processus de Paix d'Oslo. Pour quel résultat? Àl'heure où l'on parle d'exhumer la dépouille de Yasser Arafat pour enquêter sur les causes de sa mort, une manifestante palestinienne brandissait cette pancarte ces jours-ci dans le centre de Ramallah : "Autopsie d'Arafat - Autopsie d'Oslo" 

NB : à lire cet article du chercheur français Julein Salingue et celui de la journaliste française Emile Baujard

2 Comments

Pour sortir de l'impasse. Un toute logique, je pense que si en Israël peuvent cohabiter 2 millions de d'arabes avec 6 millions de juifs, l'inverse devrait être aussi possible. Que 500 mille Juifs puisent cohabiter avec 2,2 millions d'arabes palestiniens. En d'autres termes : si Israël s'interdit de faire un nettoyage ethnique contre les arabes. Le future état palestinien devrait s'interdire de faire un nettoyage ethnique contre les juifs habitant dans leurs territoires. Sans cela, il n'y aura pas de paix entre les deux états.
De toutes les façons, on ne peut plus revenir aux frontières de 67, de 49, du 7 siècle après Jésuschrist, ni du 7 siècle avant Jésuschrist.

Pour sortir de l'impasse. Un toute logique, je pense que si en Israël peuvent cohabiter 2 millions de d'arabes avec 6 millions de juifs, l'inverse devrait être aussi possible. Que 500 mille Juifs puisent cohabiter avec 2,2 millions d'arabes palestiniens. En d'autres termes : si Israël s'interdit de faire un nettoyage ethnique contre les arabes. Le future état palestinien devrait s'interdire de faire un nettoyage ethnique contre les juifs habitant dans leurs territoires. Sans cela, il n'y aura pas de paix entre les deux états.
De toutes les façons, on ne peut plus revenir aux frontières de 67, de 49, du 7 siècle après Jésuschrist, ni du 7 siècle avant Jésuschrist.

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